INTERVIEW. Rachid Nekkaz : «J’incarne le changement parce que je n’ai jamais été mêlé de près ou de loin au régime algérien»

A quelques mois de l’élection présidentielle d’avril 2014, une échéance politique capitale pour l’avenir du pays, Algérie-Focus est parti à la rencontre des acteurs politiques qui ont d’ores et déjà annoncé leur candidature. Quels sont leurs projets, leurs intentions et leurs programmes ? Comment comptent-ils convaincre les Algériens de voter pour eux ? Pour répondre à ces […] L’article INTERVIEW. Rachid Nekkaz : «J’incarne le changement parce que je n’ai jamais été mêlé de près ou de loin au régime algérien» est apparu en premier sur Algérie Focus.

Mai 17, 2024 - 14:45
 0
INTERVIEW. Rachid Nekkaz : «J’incarne le changement parce que je n’ai jamais été mêlé de près ou de loin au régime algérien»
Rachid Nekkaz

A quelques mois de l’élection présidentielle d’avril 2014, une échéance politique capitale pour l’avenir du pays, Algérie-Focus est parti à la rencontre des acteurs politiques qui ont d’ores et déjà annoncé leur candidature. Quels sont leurs projets, leurs intentions et leurs programmes ? Comment comptent-ils convaincre les Algériens de voter pour eux ? Pour répondre à ces questions, Algérie-Focus donnera la parole à tous les candidats en course pour la Présidentielle. Rachid Nekkaz, ce politicien au parcours atypique, a eu l’amabilité de répondre à nos questions. Ce candidat à l’élection présidentielle nous explicite son projet et nous parle des mesures qu’il compte adopter s’il est élu en avril prochain Président de la République algérienne.

Entretien réalisé par Abdou Semmar  

M. Rachid Nekkaz, pouvez-vous d’abord nous parler de vous, de votre parcours, de votre vie personnelle. Qui est-ce Rachid Nekkaz ? 

Je m’appelle Rachid Nekkaz, 41 ans.  Mes parents qui n’ont jamais été à l’école, sont originaires d’Algérie. Mon père est de la région de Chlef et ma mère est originaire de Bejaïa.

Je suis né en France et j’ai vécu l’essentiel de ma vie en France dans une cité populaire près de Paris et aux États-Unis. Après des études d’histoire et de philosophie à la Sorbonne à Paris, j’ai fondé en banlieue différentes associations de soutien scolaire et de développement de la citoyenneté. J’ai ensuite créé une entreprise dans les nouvelles technologies avant d’investir dans l’immobilier. 

Quel sens donnez-vous à votre engagement en politique ? Et comment avez-vous éprouvé la nécessité de devenir politicien en Algérie après avoir participé à une élection présidentielle française ? 

Je me suis porté candidat en 2007 afin de défendre principalement l’image et les intérêts des musulmans (Algériens principalement vivant en banlieue). Mais, je n’ai jamais pu être candidat officiel lors de cette tentative en 2007. À l’époque, le parti de Nicolas Sarkozy avait fait pression sur 70 Maires pour qu’ils retirent leur soutien à ma candidature.  J’avais saisi aussitôt le Conseil constitutionnel qui a considéré que ce n’était pas grave. En clair, la France n’est pas prête à voir un Algérien se présenter à l’élection présidentielle. Pire que cela, la France m’a jeté en prison pendant une semaine en mars 2012 parce que j’avais osé démontrer et révéler, vidéo à l’appui, la corruption des élus aux élections présidentielles de 2012. Sachez que la politique n’est pas une carrière pour moi. Je l’envisage comme un sacerdoce, un devoir pour servir l’intérêt général.  

Vous avez annoncé votre candidature à l’élection présidentielle de 2014. Pouvez-vous nous résumer en quelques mots votre projet politique pour cette échéance cruciale pour l’avenir du pays ? 

J’ai décidé de me porter candidat à l’élection présidentielle car j’ai conscience que l’Algérie connaît une transition importante pour l’avenir du pays. Le passage de la génération de 1962 à une nouvelle génération plus jeune qui a envie d’écrire elle aussi une nouvelle page de l’histoire de l’Algérie. Rappelons que les révolutionnaires de 1954 avaient tous moins de 30 ans. Les décideurs politiques d’aujourd’hui ont entre 60 et 77 ans.

La lutte contre la corruption (l’Algérie détient la médaille de bronze de la corruption dans le monde) et contre la ma3rifa doit être le pilier moral de la mise en place d’un Etat de droit sans lequel l’Algérie ne pourra pas se redresser et redonner confiance au peuple dans son État et dans ses institutions.

Mon projet est axé en priorité sur la jeunesse, sur un volontarisme en matière économique et politique et sur la force de l’exemplarité.

Comment comptez-vous incarner le changement tant espéré par les Algériens notamment les plus jeunes d’entre eux ? 

Déjà, j’incarne le changement avec mon âge, j’aurai 42 ans en 2014,  alors que les autres candidats déclarés ou supposés ont autour de 70 ans.

J’incarne le changement aussi car je ne fais pas partie du système. Et je n’ai jamais été mêlé de près ou de loin au régime algérien. Et le peuple algérien et les jeunes, très méfiants de nature, le savent.

J’incarne enfin le changement par ma personnalité et ma manière de communiquer avec les jeunes et les électeurs. J’ai décidé de faire des réseaux sociaux (Facebook et Twitter) le cœur de ma communication avec mes compatriotes et les médias. En pleine  campagne sur le terrain, je réponds personnellement aux messages de mes concitoyens. Et surtout j’échange et je tiens compte de leurs remarques. Je suis ainsi le seul candidat qui ai mis en place un programme collaboratif et participatif pour 2014. C’est avec ce même état d’esprit qu’entre 1998 et 2000, j’avais orchestré un livre-entretien avec les Chefs d’Etat du G7 (Clinton, Chirac, Blair, etc.) sur les jeunes et l’avenir de l’Humanité grâce à internet. 

Le chômage, la précarité, le problème du logement et l’emploi font partie des préoccupations majeures des Algériens. Quelles sont concrètement vos propositions pour prendre en charge ces besoins qui martyrisent les jeunes algériens ?  

La première mesure que je prendrai sera la fin du service militaire obligatoire qui constitue aujourd’hui une véritable épée de Damoclès chez les jeunes diplômés notamment. Un service civil de 12 mois pour les hommes et les femmes sera institué afin par exemple de « nettoyer » le pays des sacs et bouteilles en plastique, d’apporter un soutien scolaire aux élèves en difficultés, de venir en aide aux malades dans les hôpitaux ou participer au développement du Sud abandonné. Dans le même temps, j’entends mettre en place une armée de métier avec des professionnels capables d’assurer la sécurité de nos frontières poreuses. L’Algérie a déjà fermé ses frontières de façon partielle ou durable avec la Tunisie, la Libye, le Mali ou le Maroc.

Sur le plan économique, pour réduire le chômage, j’entends créer des zones franches industrielles dans les 48 wilayas afin de jeter les bases d’une économie de production capable d’une part de réduire de façon importante le niveau de nos importations et d’autre part, offrir enfin du travail à notre jeunesse qui est victime d’un chômage massif, à l’origine d’une émigration inquiétante vers l’Europe. Je veux redonner un avenir aux jeunes en Algérie.

Afin de garantir l’attribution de logements de façon juste, je propose la création d’un fichier national du logement (accessible en ligne) avec les logements disponibles et les demandeurs, afin de réduire les fraudes et les Ma3rifa.

Par ailleurs, afin d’éviter les problèmes de délinquance dus à un programme de constructions sauvages (qui ne tire aucune leçon de l’urbanisme français, vecteur de violence et de délinquance), je mettrai en place un plan de construction de logements résidentielles, c’est à dire qui épousent l’architecture d’une ville (style Haussmanien qui concilie le fonctionnel et le beau) avec des rues, des commerces, des services publics, des écoles, des espaces verts, des parkings.

Je propose aussi de rendre obligatoire la création de syndics dans tous les immeubles des villes algériennes de façon à stopper leur dégradation inquiétante (fissures, insalubrité, peinture, absence d’ascenseurs etc.), à assurer l’entretien (propreté) et programmer les travaux de rénovation.

L’Etat participera au financement des travaux de rénovation de ces immeubles.

J’entends favoriser aussi l’agriculture algérienne et viser d’ici 10 ans l’autosuffisance alimentaire. 15 milliards de $ d’importations agro-alimentaires, est-ce acceptable dans un pays qui exportait du blé dans les années 1960 ?

Le Sud algérien sera valorisé. J’envisage de faire voter une Loi-cadre qui consacrera 20% du budget de la Nation au développement du Sud (agriculture, entreprises, services publics, autoroutes transversales entre les villes du Sud, centres de formation et de recherche, universités, hôpitaux). 

Quelle est votre vision de la relation qu’entretient la religion avec l’Etat ? Etes-vous pour le retour de l’ancien parti dissous le FIS ? Quelle relation entretenez avec la mouvance islamiste et quel regard portez-vous sur ce courant politique ? 

Je crois que la religion ne doit pas intervenir dans la politique. La religion doit être au-delà des luttes politiciennes en étant l ‘âme du citoyen algérien.

Je considère en effet que les valeurs musulmanes font partie de notre profonde identité et qu’à ce titre, il est nécessaire de veiller à ce qu’elles soient enseignées et respectées.

Au sujet du FIS, non, je ne souhaite pas que le FIS ou un quelconque autre parti qui  revendique exclusivement une dimension religieuse soit autorisé à devenir un parti politique. Cependant, au nom de la liberté d’expression et de mouvement garantie par notre Constitution, je souhaite que tous les opposants politiques algériens soient autorisés à  rentrer en Algérie en respectant le cadre républicain.

Je tiens à préciser que je n’ai aucun contact avec la mouvance islamiste. Votre question semble faire référence à mon combat pour défendre le droit des femmes de porter le Niqab en France, en Belgique, en Suisse, etc.  J’ai décidé en 2010 de créer un fonds d’un million d’euros pour payer les amendes des femmes qui portent librement le Niqab en Europe car je n’accepte pas qu’on stigmatise les musulmanes derrière des prétextes fallacieux de défense de la liberté de la femme ou de sécurité du territoire. Disons-le clairement, l’Europe vote des Lois « anti-musulmannes ». Je n’ai pas le pouvoir de les changer, mais j’ai le pouvoir de les neutraliser sur le terrain, c’est ce que je fais malgré les pressions des pouvoirs publics français (fisc, plainte, diffamation etc.). 

Concernant la femme, ses droits et sa condition, envisagez-vous de proposer dans votre programme présidentiel des mesures en direction des Algériennes ?

 N’oubliez pas que j’ai vécu toute ma vie dans des pays où la femme est considérée comme l’égale de l’homme. C ‘est donc une évidence pour moi. Je ne vais pas changer de personnalité en devenant Président algérien. Je veillerai à ce que le code de la famille soit modifié de façon à garantir à la femme des droits équivalents à ceux des hommes.

Je m’engage même, dans le cadre des réformes constitutionnelles que j’entends mettre en place, à créer un poste de vice-président qui sera réservé en priorité à une femme compétente et d’expériences. 

Comptez-vous revoir le rôle de l’armée et sa relation avec les institutions de l’Etat Algérien ? Comment compteriez-vous composer avec l’establishment militaire Algérien ?

L’armée a un rôle clair dans notre constitution. Garantir la souveraineté et la sécurité du territoire algérien. En aucune manière, l’armée ne doit intervenir dans le jeu politique. Quelles qu’aient pu être par le passé les relations de l’armée avec les institutions de l’Etat algérien, je veillerai, si j’obtiens la confiance du peuple algérien, à ce qu’elles ne sortent pas du cadre constitutionnel.

Si Abdelaziz Bouteflika se présente demain officiellement pour un quatrième mandat. Pensez-vous que vous êtes suffisamment outillé pour le concurrencer et le battre dans cette élection présidentielle ?

Le Président Abdelaziz Bouteflika est un homme d’Etat qui est sage malgré une santé fragile. Il sait mieux que personne qu’il ne peut pas assumer un 4ème mandat sans affaiblir le prestige de l’Algérie dans le Monde.

Les partis politiques qui le poussent à un 4ème mandat sont irresponsables. Je les invite à la décence à l’endroit d’un homme qui a le droit de vivre une retraite méritée, en bénéficiant dans la discrétion des soins nécessaires sans avoir à se justifier et surtout sans avoir à supporter la lourde responsabilité d’un État comme l’Algérie. Voici les raisons pour lesquelles je pense que le Président Bouteflika ne se représentera pas. 

S’agissant de la fraude électorale, envisagez-vous d’adopter des mesures pour la contrecarrer et l’empêcher ?

Pour lutter contre la fraude électorale, il n’y a pas de secrets. Dans tous les bureaux de vote sans exception, il faut des observateurs  capables de signaler toute fraude possible. Ce travail d’organisation des bureaux de vote doit se faire en concertation avec les autres candidats. Dans le cas contraire, la fraude sera inévitable. Ce que je ne souhaite pas. 

Comment comptez-vous convaincre les Algériens pour qu’ils vous accordent leurs votes ? Et comment espérez-vous les mobiliser alors que le spectre de l’abstention plane sur ces élections ? 

En politique, il y a une Loi. L’abstention favorise toujours le pouvoir en place.  Donc oui, faire voter les Algériens et notamment les jeunes, est un immense défi. 9 Algériens sur 10 pensent aujourd’hui que l’élection est jouée d’avance, que le nom du président est déjà connu, que ce n’est pas la peine de voter, que les élections seront truquées etc…

Ce à quoi je réponds la chose suivante : si la jeunesse se mobilise massivement, si nous mettons des observateurs dans tous les bureaux de vote du pays (villes et douars), tout est alors possible. Car la fraude sera difficile à organiser à l ‘heure des téléphones portables avec photos et vidéos. Avec ce discours de bon sens, les esprits commencent à évoluer el hamdoulillah.

Maintenant que les Algériens commencent à me connaître un peu plus, à découvrir mes idées – grâce à la visite de 31 wilayas depuis mai 2013 –  ils découvrent aussi ma sincérité et mon indépendance d’esprit, et réalisent chaque jour un peu plus que la veille que je ne suis pas un candidat comme les autres, je ne fais pas partie du système. Et que je n ‘ai aucun intérêt matériel à cette élection. Je leur rappelle que je m’engage à ne recevoir, en guise de salaire, qu’un DA symbolique par mois si je deviens Président. Car, avant de demander aux autres de faire des efforts, il faut d’abord montrer l’exemple. L’exemplarité est une valeur à laquelle je crois plus que tout.  

Si vous êtes élu Président de la République, quelles seront les premières mesures politiques, économiques et sociales que vous allez adopter ?

Tout d’abord, je supprimerai immédiatement le service national obligatoire.

La langue Tamazight qui est aujourd’hui une langue nationale deviendra une langue officielle au même titre que l’Arabe afin de réduire  le fossé identitaire en Algérie. N’oublions pas que les Berbères sont le premier peuple d’Algérie.

Je mettrai en place le chantier qui aboutira à la mise en place d’une sécurité sociale algérienne dont le financement pourrait être effectué partiellement par une taxation  progressive des prix des carburants à la pompe.

Je convoquerai les forces vives de la Nation en vue de la création de 48 zones franches industrielles dans les 48 wilayas du pays pour favoriser l’installation d’entreprises de production, créatrices d’emplois. 

Quelle vision avez-vous de l’avenir de l’Algérie et de sa Jeunesse ?

Aujourd’hui, la jeunesse algérienne est désespérée, sans espoir et sans avenir. C’est une catastrophe humaine qui n’existe dans aucun autre pays au monde. L’Algérie est le seul État riche au monde avec un peuple et une jeunesse pauvres.

C’est un immense gâchis que chacun de nous a la responsabilité et le devoir de corriger. C’est ce à quoi je vais m ‘atteler en lui enlevant les freins qui brisent son énergie, sa créativité et son patriotisme.

Mon objectif est de donner envie à la jeunesse algérienne de travailler, de construire et d’imaginer son avenir en Algérie et non en Europe ou aux États-Unis. C’est pourquoi j’entends convaincre 100 000 cadres algériens de la diaspora vivant à l’étranger de revenir travailler et construire l’Algerie de demain sur la base d’un véritable État de droit.

Pour cela, je remplacerai la majorité des responsables administratifs à tous les échelons (national, wilaya et mairie) de façon à envoyer un signal clair aux citoyens algériens : la nouvelle administration algérienne sera à l’image de son Président, intègre et au service de la Nation.

Je lancerai un chantier sur l’administration électronique de façon à ce que le citoyen puisse commander sur internet les documents administratifs qu’ils pourront récupérer directement dans un bureau spécifique en mairie ou à la wilaya sans faire des queues interminables ou sans avoir à « payer » un fonctionnaire. Les documents les plus simples seront envoyés directement par la Poste.

 Par ces mesures, je veux redonner confiance au peuple, en son État, en son Président, en ses institutions et en son administration.

 Le traditionnel dernier mot…. 

J’invite tous les Algériens à s’inscrire massivement dès aujourd’hui sur les listes électorales et à voter tout aussi massivement pour un changement radical et pacifique en Algérie.

Tout celles et ceux qui seront convaincus  peuvent m’apporter leur soutien afin de valider ma candidature aux présidentielles.

L’article INTERVIEW. Rachid Nekkaz : «J’incarne le changement parce que je n’ai jamais été mêlé de près ou de loin au régime algérien» est apparu en premier sur Algérie Focus.

Quelle est votre réaction ?

like

dislike

love

funny

angry

sad

wow