La trahison tue mais ne donne pas la victoire

Les Etats-Unis ont veillé, du moins à ce qu’il semble, à ce que la guerre ne s’étende pas au Moyen-Orient, tout en apportant une aide illimitée à Israël, ce qui évidemment n’est pas de nature à l’inciter à la modération. Avec l’assassinat de Ismaël Haneyeh à Téhéran, ce qu’il reste de retenue aux ennemis d’Israël déjà en lutte avec lui, la résistance palestinienne en premier lieu, avec ses différentes factions, le Hezbollah, les Houthis au Yémen, outre des groupes irakiens, vient de tomber. Ces alliés du Hamas ont toujours affirmé qu’ils combattaient en soutien à Ghaza, qui reste le champ de bataille principal, et qu’ils mettraient fin à leurs opérations pour peu qu’Israël arrête son agression. La notion de front de soutien a vécu mardi dernier avant l’aube avec l’assassinat du chef du bureau politique du Hamas, pas même un militaire par conséquent. Israël n’y gagne rien. Elle a tué Haniyeh pour faire peur et pour apporter la preuve que nul de ses ennemis actifs n’est à l’abri de ses coups, qu’ils sont tous en sursis, et que désormais le Hamas a le choix entre mourir ou se rendre. Les assassinats aussi spectaculaires qu’ils puissent être ne donnent pas la victoire. S’ils la donnaient, il y a longtemps qu’Israël l’aurait obtenue, étant donné qu’en la matière il n’en est pas à son coup d’essai. Il y a longtemps aussi que le Hamas aurait cessé d’exister, dont la liste de cadres assassinés est longue.

Or le Hamas d’aujourd’hui est bien plus redoutable et aguerri que celui d’il ya quelques années. On peut en dire autant du Hezbollah. Aussi influents qu’aient pu être les dirigeants de leur vivant, ils ne sont pas irremplaçables. Un autre chef sera nommé au poste occupé par Haniyeh. Un autre à celui occupé par Mohamed Deif s’il s’avère que lui aussi est mort. Israël peut continuer à tuer un par un les résistants sans pouvoir jamais annihiler la résistance elle-même. Aucun de ces assassinats n’aurait été possible si des traîtres n’avaient pas agi au sol, devenant les yeux et l’oreille de l’ennemi, et lui indiquant avec précision dans quelle direction lancer son missile. Des journaux américains croient savoir que ce n’est pas un projectile tiré depuis le ciel qui a tué Haniyeh, mais une bombe «intelligente» placée dans le centre d’hébergement relevant des Gardiens de la révolution, et qui l’y attendait depuis des mois. N’empêche, même dans ce cas, il a fallu qu’un ou plusieurs traîtres soient sur place et déplacent l’engin pour que son explosion ne laisse aucune chance à Haniyeh. Une arme aussi sophistiquée qu’elle soit est aveugle. A vrai dire, Haniyeh n’a pas été tué par la bombe, dans le cas où ce n’est pas par un projectile tiré d’un avion, mais par le traître qui l’a déposée non loin de lui. C’est la trahison qui a tué Haniyeh mais également les autres ; ce n’est pas la supériorité technologique d’Israël, qui au demeurant n’est pas israélienne mais américaine. Par cet assassinat Israël s’est enlevé toute chance de jouir à nouveau de la paix. C’est lui qui vient de rendre impossible le retour à l’avant-7 octobre. Ce sera la guerre, une éternité de guerre, jusqu’à ce qu’il se disloque de l’intérieur, car il n’est pas une nation.