Le cas Netanyahou

Normalement le chef de gouvernement d’un pays engagé dans une guerre est populaire. Ou alors il ne tarde guère à le devenir, si d’aventure il ne l’est pas au départ, d’autant plus sûrement du reste que l’enjeu du conflit est vital et que contre toute attente ce dernier tend à se prolonger. Lorsqu’il y a […]

Jul 11, 2024 - 02:15
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Le cas Netanyahou

Normalement le chef de gouvernement d’un pays engagé dans une guerre est populaire. Ou alors il ne tarde guère à le devenir, si d’aventure il ne l’est pas au départ, d’autant plus sûrement du reste que l’enjeu du conflit est vital et que contre toute attente ce dernier tend à se prolonger. Lorsqu’il y a péril en la demeure, en effet, les querelles politiques ordinaires s’estompent pour céder la place à l’union sacrée, qui elle profite au gouvernement en place, transformé par la force des choses en cabinet de guerre. Ce n’est pas du tout le cas du Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, dont au contraire l’impopularité s’est accrue pendant ces 9 mois pleins de guerre contre la bande de Ghaza, moins parce qu’elle n’est toujours pas gagnée que parce qu’elle se prolonge, alors qu’une moitié des Israéliens ne demande qu’à la voir se terminer. Quand tout ou partie d’une opinion réclame par des manifestations quotidiennes l’arrêt immédiat des hostilités, à défaut d’une paix durable garantie par la communauté internationale, et que le gouvernement en place loin de travailler en ce sens s’applique au contraire à faire échouer les uns après les autres les rounds de négociation, il ne faut pas s’étonner que le chef de ce gouvernement en vient bientôt à être perçu comme le principal obstacle au rétablissement de la paix.

Tel est depuis plusieurs mois le statut de Netanyahou, bien qu’il y ait plus opposé que lui au sein de son gouvernement de coalition à un arrêt de la guerre avant que ses objectifs déclarés n’en soient réalisés. D’ici à ce qu’il ne soit plus dénoncé comme un obstacle au retour de la paix, mais comme quelqu’un dont l’intérêt personnel est dans la poursuite de la guerre, il n’y avait qu’un pas, franchi depuis maintenant assez longtemps. En Israël, certes, mais pas seulement, aux Etats-Unis également, l’allié sans l’aide duquel la guerre aurait été déjà perdue, où il est déjà arrivé à Joe Biden de regretter, il est vrai mezza voce, que la survie de Netanyahou soit tributaire de la guerre non de la paix. L’intérêt tangible de son administration, c’est-à-dire de sa propre réélection, est dans la paix, serait-elle temporaire, pourvu qu’elle soit assez solide pour tenir jusqu’à l’après-5 novembre, date de l’élection présidentielle. En attendant, pense-t-elle, d’accord en cela avec une bonne partie de l’opinion israélienne, un seul objectif devrait compter : la libération de tous les prisonniers détenus à Ghaza, le deuxième, l’élimination du Hamas, devrait être reporté à des temps meilleurs. Les Américains veulent tant que le gouvernement Netanyahou se range à leur avis, qui se trouve être aussi celui de la majorité des Israéliens, ou quasiment, qu’ils ont offert leur collaboration directe à la réalisation de cet autre objectif de guerre, pourvu qu’elle soit différée. Aujourd’hui, alors que l’élection est dans quatre mois seulement, ce qu’ils cherchent, ce n’est même plus à convaincre Netanyahou du bien-fondé de leur stratégie, mais à le dissuader de leur nuire directement en favorisant l’élection de Trump au détriment de la réélection de Biden. Une crainte de plus en plus palpable chez eux à mesure que se rapproche le 24 juillet, jour fixé pour le discours que Netanyahou est censé faire devant le Congrès à l’invitation retorse des républicains. Un discours qui risque d’être du même acabit que celui prononcé par le même Netanyahou en 2015, dans lequel il avait attaqué violemment le projet d’accord sur le programme nucléaire iranien porté par le président démocrate de l’époque, Barack Obama.

 

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