Décès d’Alban Liechti : le «soldat du refus» tire sa révérence 

Il était le dernier survivants des « Douze », les douze prestigieux intellectuels et personnalités françaises qui, le 31 octobre 2000, avaient appelé le président Jacques Chirac et le Premier ministre Lionel Jospin à reconnaître et à condamner, au nom de l’État français, l’usage  de la torture pendant de la guerre d’Algérie. Alban Liechti, militant communiste et appelé […] The post Décès d’Alban Liechti : le «soldat du refus» tire sa révérence  appeared first on Le Jeune Indépendant.

Aou 31, 2024 - 16:05
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Décès d’Alban Liechti : le «soldat du refus» tire sa révérence 

Il était le dernier survivants des « Douze », les douze prestigieux intellectuels et personnalités françaises qui, le 31 octobre 2000, avaient appelé le président Jacques Chirac et le Premier ministre Lionel Jospin à reconnaître et à condamner, au nom de l’État français, l’usage  de la torture pendant de la guerre d’Algérie.

Alban Liechti, militant communiste et appelé du contingent à l’heure de la ‘’guerre sans nom’’, est décédé à l’âge de 89 ans. Son décès — dont la date n’a pas été précisée — a été annoncé par le Parti communiste français, formation à laquelle le défunt appartenait depuis son irruption dans la vie militante et politique. Ses obsèques sont prévues le 4 septembre aux Yvelines (banlieue ouest de Paris).

Au miroir de l’Histoire, le nom d’Alban Liechti résonnera à jamais comme l’identité d’un homme qui, appelé sous les drapeaux au titre du contingent, a refusé d’ouvrir le feu sur le peuple Algérien. Plus que cela, le récit de la guerre d’Algérie témoignera — pour la postérité — qu’il a été le premier appelé à avoir refusé de prendre les armes contre les Algériens.

Quand, en juillet 1956, le régiment auquel appartenait Alban Liechti reçoit l’ordre d’embarquer pour l’Algérie, Alban Lietchi, 21 ans, prend une décision et c’est son dernier mot : c’est non. Le 2 juillet 1956, rappelle l’historien Alain Ruscio dans un hommage appuyé dans « L’Humanité », le jeune appelé s’empare d’une feuille blanche et d’un stylo et écrit au président de la République René Coty : ‘’Dans cette guerre, ce sont les Algériens qui défendent leurs femmes, leurs enfants, leur patrie, ce sont les Algériens qui combattent pour la paix  et pour la justice’’, raison pour laquelle ‘’je ne peux prendre les armes contre le peuple algérien en lutte pour son indépendance’’.

Auteur de nombre d’ouvrages et de travaux sur les guerres coloniales, Alain Ruscio a signé, en 2019 aux éditions La Découverte, « Les communistes et l’Algérie : des origines à la guerre d’indépendance, 1920-1962 », une somme de 664 pages qui l’a amené à connaître bien des parcours de militants dont Alban Liechti et à parler de lui en connaissance de cause. Le 5 juillet 1956 — trois jours après avoir écrit au président de la République —, ‘’il est tout de même envoyé à Alger. Désigné par la hiérarchie comme un « lâche », un « mauvais Français », il doit s’expliquer devant les autres appelés, parfois agressifs. Il persiste. Direction immédiate vers une première prison. Il passera quatre ans de sa vie derrière les barreaux, d’abord en Algérie (Tizi Ouzou, Fort-National, Hussein-Dey, Maison-Carrée…), puis en France (Baumettes, Carcassonne…). Sa libération interviendra le 8 mars 1962, dix jours avant la signature des accords d’Évian.

Dans un communiqué nécrologique diffusé, hier soir, sur son site internet, le PCF a rappelé, en le soulignant à grand trait, que Liechti ne s’est pas contenté de dire non. Quitte à alourdir son dossier et aggraver son cas devant les juridictions, il ‘’tâche de convaincre autour de lui, fait signer largement une pétition à l’orientation claire : le refus d’une guerre d’asservissement’’.  Fils de résistant, il était déjà, depuis ses 17 ans, membre de l’Union des jeunesses républicaines de France (UJRF), l’ancêtre des Jeunesses communistes, et du PCF. De quoi en faire un ‘’militant aguerri’’ lorsque, à coup de renforts militaires et de ‘’pouvoirs spéciaux’’, la IVe République s’engage à fond dans la ‘’sale guerre’’ contre la lutte d’indépendance des Algériens.  En 2005, Alban Lietchi a raconté cette expérience algérienne dans un livre — « Le Refus » — publié (et réédité depuis) aux éditions Le Temps des Cerises.

Alban Liechti rejoint les onze autres signataires de « L’Appel des Douze », partis, l’un après l’autre, ces deux dernières décennies. Leur appel a été initié et porté par le quotidien L’Humanité. Il s’agit de : Henri Alleg, ancien directeur d’ Alger républicain, auteur de La Question ; Josette Audin, épouse de Maurice Audin, assassiné par ses tortionnaires ; Simone de Bollardière, veuve du général Pâris de Bollardière, opposé à la torture et condamné à deux mois de forteresse ; Nicole Dreyfus, avocate de Baya Hocine et de Djoher Akrour ; Noël Favrelière, rappelé, déserteur ; Gisèle Halimi, avocate de Djamila Boupacha ; Alban Liechti, rappelé, insoumis ; Madeleine Rebérioux, historienne, secrétaire du Comité Audin ; Laurent Schwartz, mathématicien, président du Comité Audin ; Germaine Tillion, ethnographe, résistante, auteur de L’Afrique bascule vers l’avenir ; Jean-Pierre Vernant, historien, résistant ; Pierre Vidal-Naquet, historien, auteur de La Torture dans la République.

 

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