Enquête annuelle « Pour un numérique soutenable » : l'empreinte environnementale des équipementiers de réseaux mobiles désormais évaluée, celle des opérateurs de centres de données et des opérateurs télécoms continue à augmenter

Enquête annuelle « Pour un numérique soutenable » : l'empreinte environnementale des équipementiers de réseaux mobiles désormais évaluée, celle des opérateurs de centres de données et des opérateurs télécoms continue à augmenter - Investigations

Avr 17, 2025 - 15:30
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Enquête annuelle « Pour un numérique soutenable » : l'empreinte environnementale des équipementiers de réseaux mobiles désormais évaluée, celle des opérateurs de centres de données et des opérateurs télécoms continue à augmenter

Conformément à la mission qui lui est confiée par le législateur pour suivre l'impact environnemental du numérique en France (voir encadré), l'Arcep collecte des indicateurs auprès des acteurs du numérique et restitue ces informations dans une publication : l'enquête annuelle « Pour un numérique soutenable ». Celle-ci est accompagnée d'une synthèse infographique. L'an passé, au-delà de la collecte auprès des quatre principaux opérateurs, l'enquête avait été enrichie d'indicateurs sur les fabricants de terminaux et les opérateurs de centres de données. Dans cette quatrième édition, l'enrichissement se poursuit avec la publication d'indicateurs sur une nouvelle catégorie d'acteurs : les équipementiers de réseaux mobiles.

Malgré une légère amélioration de l'efficacité des centres de données, leur impact environnemental progresse rapidement avec le développement des usages et l'externalisation des services informatiques

Depuis 2020, l'implantation de nouveaux centres de données s'intensifie, se concentre en Ile-de-France et concerne des centres avec des capacités informatiques de plus en plus importantes. Sur l'ensemble des centres exploités par les opérateurs de centres de données en 2023 (près de 150), huit ont été mis en service sur la seule année 2023, dont six en Ile-de-France. Ces huit centres figurent parmi les plus puissants : ils disposent d'une capacité informatique moyenne de 11 MW par centre[1], bien supérieure à la moyenne de 3,8 MW des autres centres.

Parallèlement, les émissions de gaz à effet de serre des opérateurs de centres de données progressent de 11 % en 2023, en raison de l'augmentation significative des émissions indirectes liées à la consommation d'électricité. Cette dernière progresse de 8 % alors que la consommation d'électricité du secteur tertiaire (auquel appartiennent les centres de données) diminue. Les centres de données plus récents ou possédant une capacité informatique importante ont, en moyenne, une meilleure efficacité énergétique.

En outre, le volume d'eau prélevé par les centres de données, pour l'essentiel de l'eau potable, atteint 681 000 m3 en 2023, un niveau qui reste modeste au regard des volumes prélevés pour d'autres usages. Néanmoins ce volume augmente fortement pour la deuxième année consécutive (+ 19 % en 2023).
Les émissions de gaz à effet de serre des opérateurs télécoms et la consommation énergétique des réseaux augmentent, portées par la croissance des usages numériques
Alors que les émissions de gaz à effet de serre en France diminuent de 5,8 %, celles des principaux opérateurs télécoms progressent de 4 %, atteignant 397 000 tonnes équivalent CO2 en 2023. Cette hausse, qui concerne aussi bien les émissions directes (+ 2 %) qu'indirectes (+ 5 %), résulte de l'augmentation de la consommation énergétique des réseaux mobiles.
En effet, alors que la consommation électrique nationale recule de 3 % en 2023, celle des réseaux télécoms continue de croître (+ 2 %, soit 4,1 TWh). La consommation des réseaux mobiles progresse (+ 6 %), mais à un rythme plus modéré qu'en 2022 : d'une part, le rythme de déploiement des sites mobiles ralentit, et d'autre part le volume de données mobiles continue de progresser, mais à un rythme inférieur aux années précédentes (+20% en un an en 2023 contre + 28% en 2022). À l'inverse, la consommation des réseaux fixes continue de décroitre fortement (- 14 %), notamment en raison de la poursuite de la transition du réseau cuivre vers les réseaux en fibre optique plus efficaces énergétiquement.
Equipements de réseaux mobiles : 2,4 tonnes de métaux précieux, 79 000 tonnes équivalent CO2.

La phase de fabrication des équipements de réseaux mobiles représente, selon l'étude ADEME-Arcep, une part importante de l'épuisement des métaux et minéraux stratégiques et de l'empreinte carbone au sein du cycle de vie des réseaux. En 2023, la fabrication des équipements de réseaux d'accès mobiles vendus en France a nécessité 2,4 tonnes de métaux précieux, marquant une diminution pour la deuxième année consécutive. Cette baisse est principalement due à une réduction significative des ventes d'équipements, et non à une modification de la composition des produits. La consommation moyenne de métaux précieux par équipement demeure en effet stable depuis 2021, autour de 17 g.
Les émissions de gaz à effet de serre embarquées correspondent à l'ensemble des émissions carbone tout au long du cycle de vie, hors phase d'usage. Celles des équipements de réseaux d'accès mobiles vendus en France en 2023 s'élèvent à 79 000 tonnes équivalent CO2. Ce chiffre ne tient compte que des équipements vendus en 2023, et n'est donc pas représentatif des émissions de l'ensemble des équipements de réseaux d'accès mobile déployés par les opérateurs mobiles.
Les volumes d'équipements numériques mis sur le marché continuent de diminuer, mais la taille des écrans continue d'augmenter
La baisse des mises sur le marché des équipements numériques en 2023 s'explique par de nombreux facteurs tels qu'une inflation soutenue en 2023, ou encore un taux d'équipements déjà élevé pour certains.

Cette tendance devrait contribuer à réduire l'empreinte environnementale des fabricants. Mais cette réduction pourrait être contrebalancée par plusieurs évolutions du marché. D'une part, l'intégration de nouvelles fonctionnalités avec le développement de l'intelligence artificielle générative pourrait inciter au renouvellement des équipements. D'autre part, la taille des écrans ne cesse d'augmenter, entraînant une hausse de leur impact environnemental. En effet, en phase d'utilisation, les équipements dotés de grands écrans consomment davantage d'électricité : un téléviseur de grande taille consomme en moyenne six fois plus d'électricité qu'un modèle de petite taille, un écran d'ordinateur de grande taille consomme, en moyenne trois fois plus qu'un écran de petite taille.
La prochaine édition de l'enquête annuelle « Pour un numérique soutenable » sera enrichie de nouveaux indicateurs et de données collectées auprès des équipementiers de réseaux fixes fabriquant des câbles en fibre optique.
Poursuivant sa démarche d'enrichissement progressif de sa collecte de données sur l'impact environnemental du numérique, l'Arcep collectera courant 2025 de nouveaux indicateurs auprès des acteurs déjà concernés, et étendra sa collecte aux équipementiers de réseaux fixes fabriquant des câbles en fibre optique, conformément à sa décision de collecte du 21 novembre 2024 (voir le communiqué).
Des pouvoirs de collecte de données environnementales confiés à l'Arcep par le Parlement

En 2021, la loi 23 décembre 2021 visant à renforcer la régulation environnementale du numérique par l'Arcep, a confié à l'Autorité la mission de concevoir un baromètre environnemental, et lui a donné la possibilité de collecter des données environnementales non seulement auprès des opérateurs de communications électroniques, mais également auprès des fournisseurs de services de communication au public en ligne, des opérateurs de centres de données, des fabricants d'équipements terminaux, des équipementiers de réseaux et des fournisseurs de systèmes d'exploitation. En 2024, la loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique (loi « SREN ») a élargi les pouvoirs de collecte de l'Arcep aux fournisseurs d'informatique en nuage.

L'enquête annuelle « Pour un numérique soutenable », un outil au service du débat public et de la réflexion pour une stratégie bas carbone du numérique

Avec son enquête annuelle « Pour un numérique soutenable », l'Arcep poursuit quatre objectifs :
• informer les citoyens, les acteurs publics et l'ensemble des parties prenantes sur les impacts environnementaux du numérique ;
• identifier les activités des acteurs économiques susceptibles d'avoir un impact sur l'environnement ;
• inciter les acteurs à cibler leurs actions vers les mesures les plus efficaces en matière d'impact environnemental ;
• suivre l'évolution de ces indicateurs dans le temps, afin d'apprécier les effets des actions de protection de l'environnement menées par les entreprises et de fournir des éléments pertinents pour l'évaluation des politiques publiques sur le numérique et l'environnement et, en particulier, des actions de l'Autorité en la matière.